



Hommage à mon père, Joël Girard, artiste, penseur, esprit libre, frère du Tout-Monde
Aujourd’hui, nous avons accompagné Joël Girard.
Nous l’avons laissé auprès des siens : ses parents, Florent et Annette,
son oncle Rosan, celui qui l’a initié au communisme et qui fonda le Parti Communiste Guadeloupéen,
et sa grand-mère Augusta, qui lui montra le chemin des mondes invisibles.
Pour elle, il avait écrit un livre : Le Chant d’Augusta.
J’espère pouvoir un jour lui donner la lumière d’une publication.
Aujourd’hui, la Konk a sonné.
Les Boula é Maké ont résonné.
Chanté la chanté…
Une musique mystique pour t’accompagner.
“Oh lé lé – Misyé Élwa”
“Kyo ban nou nouvèl” « Héron, donne-nous des nouvelles»
devenu “Jo, ban nou nouvel”
“Misyé Joël monté o filao” « Monsieur Joël s’est élevé dans les cimes du filao»
Une page se tourne. Définitivement.
Il y a un avant, et il y aura un après.
Toi qui disais, avec malice et ironie, qu’il fallait avoir au moins trois enfants,
« parce que si t’en perds un, il t’en reste deux »…
Aujourd’hui, je perds un père, honoré par ses pairs.
Et il me reste une constellation de valeurs.
L’amour, donné sans artifice, sans grands discours, parfois même sans mots.
Un amour discret, solide, enraciné.
Le détachement vis-à-vis des choses matérielles; en particulier l’argent.
Tu avais choisi de posséder autre chose.
L’hospitalité : j’en reste encore stupéfait.
Ton toit était ouvert à tous, même dans les situations les plus compliquées,
et pour n’importe qui dans la difficulté.
Tu donnais sans compter.
Certains en ont abusé: tu le savais, mais tu ne laissais personne dehors.
Ta générosité, elle aussi, dépassait les attentes.
Combien sont repartis de chez toi avec une œuvre, une parole, une idée ?
Plus riches d’un morceau de toi, sans que tu n’attendes jamais rien en retour.
Au lycée, mes professeurs parlaient de ta bibliothèque comme d’un monument.
Mé a pa tou di ni liv « ce n’est pas tout d’avoir les livres ».
Mais toi, tu les lisais pour comprendre, pour relier, pour forger une pensée,
pour construire une vision du monde et en imaginer un meilleur.
Et cette accumulation de savoir…
On m’a raconté que sans jamais avoir mis les pieds sur la terre d’Afrique,
tu étais capable d’en tracer les frontières, d’en nommer les capitales,
d’en évoquer les peuples, les histoires.
Et à l’ère de l’intelligence artificielle,
je me dis que ton système neuronal aurait mérité d’être étudié.
Je comprends mieux aujourd’hui pourquoi tant d’intellectuels, militants,
artistes ou anonymes, de tous milieux, se retrouvaient chez nous, à ta table à discuter du Tout-Monde et à en réinterpréter les contours; parfois en présence d’Édouard Glissant lui-même, ton père spirituel, qui venait régulièrement nous rendre visite.
Ton immense soif de savoir était inextinguible.
Elle t’a permis de te lever face au colonialisme sous toutes ses formes.
Elle a nourri ta révolution;
une révolution douce, faite d’arts, de livres, d’idées… mais pas que…
Et tu nous as invités à mener, nous aussi, la nôtre.
Tu rêvais un autre monde.
Et tu voulais l’offrir à tous les enfants guadeloupéens, pas seulement à nous, Audrey et moi.
Tu as rêvé une autre Guadeloupe jusqu’en 1989.
Puis tu as dû faire preuve de résilience,
car ce rêve-là, tu savais que tu ne le verrais pas de ton vivant.
Alors tu t’es aussi réfugié ailleurs.
Dans un monde où le visible et l’invisible cohabitaient.
Un certain liquide servait de passeur…
Un monde ancestral, nourri de présences, d’énergies, de messages
venus d’un ailleurs que l’Occident peine à comprendre.
Un monde qui t’aidait, sûrement, à supporter celui-ci.
J’ai posé tant de questions sur ton histoire, ton parcours, les zones floues…
Tu souriais, tu restais silencieux.
Tu ne trahirais jamais la cause, ni tes frères d’armes.
Tu pars avec beaucoup de secrets.
“Et si Bob Marley n’était pas mort…”
Je suis encore plus fier d’être né un 27 mai 😅.
La douleur. La résistance.
Toi, tu avais cette faculté dont je ne pense pas avoir héritée:
de ne pas ressentir la douleur. Qu’elle soit physique, mentale, ou autre.
Une force que je comprends aujourd’hui comme spirituelle,
bien au-delà de la physiologie.
Tu avais un amour puissant pour la liberté, la justice, la lutte.
Tu regardais la Guadeloupe avec le rêve d’une liberté semblable à celle d’Haïti ou de Cuba.
Et pourtant, tu nous as quittés sur une terre encore sous domination.
Tu la rêvais indépendante.
Tu disais : dans ce cas, vouloir être enterré sur la terre de la révolution.
J’ose croire qu’elle est en marche; autrement, ailleurs.
Qu’elle prend une autre forme.
Qu’elle embrasse de nouveaux enjeux, une vision encore plus vaste.
Sûrement grâce à tonton Rosan et notamment son ouvrage “Message à l’ombre des filaos : matériaux pour la nouvelle révolution”,
tu l’avais déjà compris :
La Guadeloupe comme laboratoire du monde.
Et aujourd’hui, c’est le monde lui-même qu’il faut libérer.
Je veux te dire à quel point je suis fier de toi.
De ton humilité.
De ta dignité.
De ta vision.
De ta bienveillance.
J’espère en avoir hérité.
Merci d’avoir été là.
Merci d’avoir montré une autre voix.
Une autre voie.
Ta femme, Éliane, Maman, m’a donné des racines.
Toi, tu m’as donné les étoiles.
Merci à vous tous d’avoir accepté ma requête de ne pas être seul aujourd’hui. J’ai une sœur Audrey pour continuer à avancer.
Joël Girard (1951–2025), artiste guadeloupéen, peintre, poète, écrivain et sculpteur.
Penseur autodidacte, militant anticolonialiste.
#PenséeCaribéenne, #Hommage, #Transmission #Heritage #Transmission #LettreDeFils #Gratitude
Magnifique hommage ♥️. Il continuera à guider tes pas. Lyen étewnèl.
Magnifique texte qui me permet d’enfin mieux te connaître kanmarad. Fos pou la mater aw sè aw é vou.
Bien plus que des mots, une transmission, une voix un magnifique témoignage d’Amour et de fierté.
Tu es ce filao encré dans la terre et touchant les étoiles par ses immenses branches.
Fos épi kourag nou paka lagué ayen !
Ton amie
Christelle
Merci de partager ces mots avec nous. J’aurais aimé le rencontrer.
Foss et Kouraj !
Jocelyn
Ké aw ka palè klé è fô kamarad … !!!
Sa fondal è bel
Fos è lanmou pou vou è fanmi aw
Titi,ton texte est telle une toile d’araignée:
Il te capture et t’offre à la fois une multitude d’horizons,d’émotions….de pensées….
Sonjé: Bambou pliyé pa ka kasé.
Sarah Doog’
Way! Que d’amour et de fierté exprimés avec sincérité et simplicité. Sa bèl Thyeks!👌✌️🫵❤️
Honneur et Respect aux grands hommes de ce petit pays.
Amour et Gloire à nos pères, ces rois de nos empires enfantins à la conquête de l’être et de l’avoir.
Ces fils de nos ancêtres qui offrent leur âme, leur chair, aux combats de ce monde pour nous offrir les cadeaux de la Vie.
Comme une main tendu sur les roches qui traversent la rivière…
Comme un regard qui ouvre le sentier qui gravit la montagne…
Comme un canot qui emporte sur la mer…
Aux plus près des horizons de nos rêves et de nos espoirs…
Dans la chaleur et la sensation de leur présence éternelle.
Grâce aux Cieux et Gratitude sur la Terre pour nos héros.
Merci Joel
Merci Michel, mon père
Toutes mes Condoléances frères, tu as un bel héritage ! À toi de continuer…
Adieu l’ami Joël
Te voir englué
Dans la mer de la mort
C’est raide
Comme un coup de rhum sec
Toi dont la conscience était soleil
Trop tôt levé
Trop fort rêvé
Toi qui as chevauché les imaginaires
Inaccessibles
Toi l’ami des utopies du vivre
Intensément
Rebelle aux idées convenues
A la pensée coloniale
Aux masques hypocrites des bien-pensants
Tu as mené ta vie
Hors des sentiers battus
En haute-fidélité à ton idéal
D’artiste
De poète
De peintre
De sculpteur
Autant d’héritages
Légués aux étoiles
D’une humanité jamais lasse
De porter le toujours des jours
La conscience des peuples
L’éclat rebelle d’une vie
Non Jo tu n’es pas mort
Prophète d’un temps à venir
Tu annonces
La force du vrai
La vérité de la beauté
L’éternité de l’aurore
Inscrite
Dans ton devoir d’éclairer la vie
L’amitié s’en souvient
La Guadeloupe s’en souviendra
Ernest Pépin
Le samedi 21 juin 2025
Merci parrain…
Digne hommage en guise de béquilles pour tenir debout puis avancer. Mon amical soutien.
Je suis si désolée je te présente mes condoléances, qu’il repose en paix. Il continuera de veiller sur toi de la haut et demeure auprès de toi ou que tu sois. Il est homme d exception et tu as de quoi être fier. Continue de briller en son honneur tu es son digne fils. 💕🙏🏽😘
Je me souviens de ce temps où la discussion se faisait belle et rebelle, entourée de magnifiques toiles que j’essayais de comprendre. J’étais petite et pourtant, tout me fascinait, les connaissances apportées sur le fil du cerveau, la couleur en drapée sur des toiles immenses et les repas toujours présents. Merci pour tous ces moments qui ont bercé mon enfance, mon adolescence et plus encore.
Thierry, c’est un très bel hommage que tu lui as rendu. Merci de l’avoir partagé avec nous. Respect et fierté. Il continuera de veiller sur vous de là-haut et demeurera à vos côtés, où que vous soyez. Fòs é Kouraj .
Les paroles venant du cœur sont des paroles d’ « Homme ». … Je te remercie, de nous confirmer, au travers de ce témoignage, que nous n’avons que le droit au Mieux. On bèl fôs pou’w Mr T.
Speechless…
I think he was proud of you and will always be…
Love to Audrey and You
Tu sembles avoir aussi hérité d’une plûme à laquelle j’espère que tu donneras plus largement aussi la lumière d’une publication !
Très bel hommage… il l’honore et il t’honore !
Fos frangin !
Audrey et toi êtes dans mon coeur !
Très beau texte. Sincère et vrai.
Je te connais peu… en tout cas silencieux.
Je tiens à saluer cet hommage majestueux. En attendant le chant d’Augusta, merci pour cet adieu.
Salut Thierry, salut Audrey,
J’ai connu Joel comme un grand frère, un artiste, un philosophe bo kaz entre sa maison de Pointe-a-Pitre et la maison de Marie-Galante.
Sans connaître toutes les dimensions du personnage, d’instinct j’ai su que je devais m’abreuver à sa source, cela a contribué à former l’homme que je suis devenu.
Force à lui, il poursuit sa mission de pionner… de l’autre côté du miroir et nous attend.
Courage a vous deux
J’ai pris un grand plaisir à lire ce que tu as voulu livrer à celles et ceux qui ont pris et prendront le temps de te lire.
J’ai tenu à être présente au « finissage » parce que l’univers a rendu cela possible et J’ai vu le profond respect que tu portes à ce grand monsieur qui est ton papa.
Je comprends d’où tu tiens cette humilité ET cette humanité: L’Union de deux grandes forces de la nature.
L’après est déjà en route et il demeure à jamais à tes côtés.
Quel bel hommage de partage!
Bel héritage reçu et maturé : humanité, humilité, loyauté et combativité.
Limyè lanmou kléré.
Amitiés.
Un texte d’une profondeur dimension.
Félicitations!
Fòs é kouraj pou kontinyé asi chimen-la…
Mèsi……..
Bien dit… honneur et respect.
Texte au combien profond , poétique et émouvant
Beau témoignage pour un homme inspirant et qui a su vous transmettre des valeurs solides et l’amour du pays
Fos à Audrey, ta maman et à toi
Tchimbé fò
💜 Merci Yannick